Partie 1 : Mégatendances et contexte changeant pour les investisseurs

15 juin, 2023

Le secteur de la gestion des placements se trouve actuellement à un point d’inflexion. Jusqu’à 2021, la performance de ce secteur bénéficiait du faible coût et de la grande disponibilité du capital, d’un nombre record de transactions et d’une solide performance des marchés. Les gestionnaires de placements ont ainsi accueilli favorablement les défis posés par les enjeux sociaux, tels que les changements climatiques.

Depuis 2022, les gestionnaires de placements doivent composer avec un contexte plus volatil et beaucoup plus complexe. Les banques centrales tentent de freiner l’inflation galopante au moyen de hausses des taux d’intérêt, faisant diminuer les valeurs boursières et l’abondance de capitaux. Toutefois, les enjeux sociaux de la dernière décennie sont toujours présents – et même plus pressants – de sorte qu’il est désormais impératif de s’y attaquer.

Les principales tendances et leur incidence sur les gestionnaires de placements – tant sur les détenteurs d’actifs que sur les gestionnaires – comprennent ce qui suit :

  • Changements climatiques : Les émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement planétaire sont en hausse, tandis que les phénomènes météorologiques extrêmes sont de plus en plus fréquents. Les organismes de réglementation, dont la Securities and Exchange Commission (SEC), mettent au point des politiques relatives à la présentation d’information liée aux changements climatiques qui entreront en vigueur au cours de l’exercice 2023. De nouveaux sous-ensembles de lois sur les changements climatiques visant les engagements à cet égard, tels que les engagements à atteindre la carboneutralité, voient le jour. Les capacités horizontales liées au climat permettant une communication de l’incidence des changements climatiques transparente deviennent des enjeux de base pour les gestionnaires d’actifs, tandis que les stratégies de création de valeur ESG deviennent des facteurs de différenciation dans les secteurs clés, principalement ceux qui sont touchés par la transition énergétique.
  • Perturbation technologique : Alors que les technologies de pointe telles que l’apprentissage machine et l’intelligence artificielle deviennent de plus en plus courantes, le rôle de la technologie au sein de la chaîne de valeur évolue, passant d’un facteur d’entrée isolé à une capacité distinctive. Une intégration réussie peut rehausser la productivité, mais les entreprises doivent être conscientes des risques inhérents, tels que les arriérés technologiques et la cybersécurité. Après avoir favorisé des solutions ponctuelles pendant plusieurs années, dont une bonne partie n’a pas encore migré vers le nuage, de nombreux gestionnaires de placements ne sont pas encore prêts pour les technologies de nouvelle génération.
  • Changements démographiques : La population vieillissante, la baisse des taux de natalité, la diminution de la population active et les avancées dans le domaine de la santé viennent augmenter le ratio de la population inactive à la population active (soit la population âgée de plus de 65 ans par rapport à la population plus jeune). Les détenteurs d’actifs ayant des passifs liés à l’âge, comme les caisses de retraite et les compagnies d’assurance, verront une augmentation de leurs engagements de versement et de leurs passifs. Dans un contexte où l’inflation persiste, ces organisations devront revoir leurs stratégies de placement en mettant davantage l’accent sur les rendements réels et en intégrant de nouvelles catégories d’actifs ainsi qu’une couverture mondiale, entre autres.
  • Un monde de plus en plus divisé : La guerre continue en Ukraine, les tensions géopolitiques et la polarisation au sein du pays créent un monde de plus en plus divisé, marqué par les changements d’allégeances et de partenariats commerciaux, les risques visant la chaîne d’approvisionnement et l’accès aux matières ainsi que par le ralentissement de la croissance économique. Alors que les flux financiers et migratoires continuent de fluctuer, les gestionnaires de placements ne bénéficient plus nécessairement de la diversification géographique de la même façon que par le passé. Outre l’accès restreint aux investissements étrangers, la polarisation vient exacerber les contraintes de liquidités. Ainsi, certains gestionnaires pourraient devoir se concentrer davantage sur leur marché local, tandis que d’autres devront envisager des stratégies ou des régions différentes.
  • Instabilité économique : Ensemble, les mégatendances mentionnées jusqu’ici accroissent l’instabilité économique et sociale. L’effet secondaire des politiques économiques découlant de la pandémie, les pressions inflationnistes et l’agitation géopolitique sont tous des facteurs qui contribuent à assombrir les perspectives économiques. La crainte de récession de plus en plus répandue freine la performance des marchés, tandis que l’inflation et la complexité croissante de l’exploitation ont fait en sorte d’augmenter les coûts en pourcentage des rendements dans toutes les catégories d’actifs. Les cabinets prospères devront gérer le besoin de rehausser l’efficacité opérationnelle et l’efficience au chapitre des coûts, tout en trouvant des façons d’innover pour obtenir de meilleurs rendements et assumer de façon sélective des risques de plus en plus élevés.

Une occasion à saisir

Alors que les tendances actuelles du marché complexifient les choses pour les gestionnaires de placements, elles recèlent également des opportunités. Par le passé, les organisations ayant rehaussé de façon proactive leur résilience et leur gestion des coûts tout en favorisant une croissance et une agilité axées sur la valeur ont maintenu et propulsé les positions sur les marchés durant les périodes tumultueuses. Notre étude de marché a permis de dévoiler cinq opportunités stratégiques susceptibles d’aider les gestionnaires de placements à composer avec la situation :

  • Revoir les stratégies de placement et de répartition d’actif. En raison des tendances susmentionnées, il est probable qu’il faudra restructurer de nombreux portefeuilles afin de prospérer dans ce nouvel environnement – il peut s’agir d’un rééquilibrage des stratégies actives par rapport aux stratégies passives et des emplacements géographiques privilégiés, de l’introduction de leviers ou encore de l’augmentation de la pondération des marchés privés, principalement pour le capital investissement et les actifs tangibles. Outre la modification de la répartition d’actif, l’élaboration de nouvelles stratégies tout en maintenant un rythme efficace, les corrélations, la volatilité et les liquidités sera essentielle pour obtenir de bons résultats.
  • Appliquer une approche globale du portefeuille. La gestion des risques et des rendements de façon globale pour la totalité du portefeuille – ce qui comprendra de plus en plus d’actifs privés et publics variés pour optimiser la répartition du capital en vue des rendements réels – sera un facteur de différentiation pour les gestionnaires de placements. Ceux qui seront en mesure de développer de façon efficace des capacités humaines, opérationnelles et technologiques pour exécuter une gestion dynamique du portefeuille dans son ensemble, afin de réagir au risque géopolitique, aux facteurs climatiques et à divers scénarios de placement axés sur l’inflation et les passifs obtiendront de meilleurs résultats.
  • Revoir les modèles d’exploitation pour soutenir les stratégies changeantes. Les entreprises de gestion de placements devront se transformer et adapter leurs modèles d’exploitation et leurs capacités tant pour les services de première ligne que pour les fonctions d’arrière-plan. Elles devront déterminer les capacités nécessaires, concevoir un modèle d’exploitation et une structure organisationnelle efficaces et les mettre en œuvre, souvent de façon progressive. Elles devront également se poser des questions essentielles sur l’habilitation liée à l’implantation de technologies à grande échelle, l’impartition, à la délocalisation et au rehaussement des talents, en tenant compte des avantages et des inconvénients de chaque option.
  • Consolider et simplifier l’infrastructure technologique. La technologie n’est plus une capacité complémentaire : elle est désormais fondamentale pour les entreprises. En ce qui concerne les gestionnaires de placements, des choix technologiques efficaces peuvent faire la différence entre la survie et l’effondrement. Les chefs de file dans ce domaine concrétisent tous les aspects de la productivité en coordonnant et en regroupant les applications et les plateformes existantes selon les capacités fondamentales de l’entreprise et en se fiant à une source unique de renseignements grâce aux données et à l’analytique.
  • Harmoniser la mission, la culture et les modes de travail. Comme l’indique le dicton : « La culture mange la stratégie au petit déjeuner. » Ce dicton n’a jamais été aussi vrai qu’en période de perturbations des marchés. Les entreprises qui définissent une mission et des objectifs clairs, jumelés à une compréhension commune des façons de travailler ensemble, seront capables de créer un environnement favorisant l’innovation et la transformation subséquente. Ces entreprises adopteront les technologies de pointe plus rapidement et réduiront au minimum les tâches routinières pour mettre l’accent sur des activités à valeur ajoutée, ce qui aura pour effet d’attirer et de retenir les professionnels des placements et de l’exploitation.

Dans la deuxième partie, nous traitons des répercussions de ces mégatendances sur les entreprises de gestion de placements, sur leurs dirigeants et sur leurs priorités.

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Kai Lakhdar

Kai Lakhdar

Associé et leader national, Conseils, Capital-investissement et régimes de retraite, PwC Canada

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