Adam : Bonjour et bienvenue à ce nouvel épisode de balado de PwC Canada. La série « Finance in 15 » porte sur la transformation de la fonction Finances et ce qu’elle signifie pour les dirigeants financiers. Je m’appelle Adam Boutros et je suis votre hôte.
Marino : Bonjour et bienvenue à la saison 2 du balado « Finance in 15 ». Je m’appelle Marino Fremis et je suis votre hôte invité. Pour ceux qui ne la connaissent pas, la série « Finance in 15 » porte sur la transformation de la fonction Finances et ce qu’elle signifie pour les dirigeants financiers. Aujourd’hui, j’ai le grand plaisir de recevoir Darren Millman, chef des finances chez Centerra Gold, qui nous parlera de l’importance d’avoir des données précises pour améliorer la prise de décision et déceler les problèmes potentiels dans une organisation. Darren, bienvenue.
Darren : Merci Marino. Très heureux d’être là.
Marino : Darren, pour commencer, pouvez-vous nous parler de votre expérience à titre de chef des finances de Centerra Gold et nous dire quelques mots sur votre entreprise?
Darren : Bien sûr. Je suis entré chez Centerra en 2013 comme trésorier; je suis passé v.-p. Finances et trésorier en 2015 et suis devenu chef des finances en avril 2016. Je suis chargé des services financiers et commerciaux, des relations avec les investisseurs, des technologies de l’information, de l’assurance risque, de la trésorerie et de la fiscalité et, comme vous le savez Marino, d’un nouveau projet de transformation des technologies de l’information de l’entreprise.
Marino : Très bien. C’est exactement ce dont nous voulions parler. Nous savons que vous venez d’entreprendre une transformation importante de vos technologies de l’information dans l’objectif d’établir ce que vous avez appelé « une seule version de la réalité ». Pourriez-vous expliquer à nos auditeurs ce que cela signifie et comment tout a commencé?
Darren : Bien sûr, mais il faut d’abord savoir par quoi nous sommes passés avant cette transformation. Avant 2016, nous avions une mine en exploitation, un projet en développement et une autre mine en fin de vie. En 2016, nous avons fait l’acquisition de Thompson Creek Metals qui avait une grande mine en exploitation en Colombie-Britannique, une usine métallurgique aux États-Unis, deux mines en maintenance en Colombie-Britannique et une autre aux États-Unis. En 2018, nous avons obtenu l’autorisation de lancer la construction de notre projet aurifère en Turquie et nous avons aussi fait l’acquisition de AuRico Metals Company qui avait un projet en développement en Colombie-Britannique. Tous ces changements ont entraîné une multiplication des sites et des systèmes informatiques. Donc, comme vous vous en doutez, notre premier objectif a été d’intégrer les activités, pas les systèmes informatiques. Mais lorsque nous avons pu prendre un peu de recul, nous avons vite conclu que nous devions établir une seule version de la réalité. Donc pendant deux ans environ, nous avons analysé ce qui se faisait sur les différents sites, en pesant le pour et le contre. Nous cherchions à éliminer les divers contournements et à identifier et recueillir les données adéquates dans les bons systèmes pour pouvoir les utiliser aujourd’hui et dans l’avenir. L’important était d’avoir les commentaires des utilisateurs de première ligne, que nous avons intégrés dans les rapports de gestion, en tenant compte bien sûr de nos principales parties prenantes. Ainsi nous avons pu obtenir l’engagement de tous pour recueillir des données et fournir à nos employés une information qui les aide à prendre les bonnes décisions.
Marino : À ce sujet Darren, il y a une chose dont nous avons parlé souvent, et c’est la gestion du risque dans un processus de transformation, n’est-ce pas? Pouvez-vous nous en dire plus sur ce que vous avez fait pour mieux gérer le risque pendant votre transformation?
Darren : Il y a plusieurs risques en fait. Il y a le risque que nous prenons pendant la phase d’acquisition. Il y a la gestion du risque dans les opérations et il y a les risques qu’on décide de prendre. Lorsqu’on a réuni toute l’information, on est en mesure d’évaluer le risque et d’assurer que tous les éléments de gestion du risque sont intégrés dans l’organisation. Comme je l’ai dit plus tôt, nous faisons des acquisitions, nous sommes en activité et nous avons des mines en maintenance. Par conséquent, il a fallu mettre en place une gestion systématique du risque dans l’entreprise, ce qui a pris quelques années. Aujourd’hui nous utilisons cette approche de gestion de risque dans nos processus de contrôle diligent, dès l’acquisition. Le processus est d’ailleurs employé dans l’ensemble de l’entreprise pour assurer, une fois encore, que nous avons la bonne information et que nous prenons des décisions éclairées.
Marino : Vous avez prononcé le mot qui m’intéresse toujours : décision éclairée. Si on pense aux rapports de gestion que vous avez mentionnés plus tôt, qu’est-ce qu’une décision éclairée pour vous et pour Centerra?
Darren : Alors nous sommes dans ce processus d’amélioration des systèmes d’information et nous cherchons à nous assurer que les gens aient le bon système. Nous avions 13 systèmes différents chez Centerra pour réunir des données. Et nous voulions vraiment implanter une solution SAP. Le système ERP est l’un des plus importants pour nous et nous voulons ramener le tout à trois systèmes pour couvrir non seulement les finances, mais aussi les normes ESG et tout ce dont nous avons besoin pour prendre les bonnes décisions. Nous devons aussi nous assurer d’obtenir les données des sites pertinents. Ensuite il faut que les employés reconnaissent l’importance de tout cela afin qu’ils puissent prendre les bonnes décisions de façon efficace et efficiente. Mais en même temps nous devons éviter un trop-plein d’information. Vous savez, nous pouvons obtenir tellement de données que nous n’avons jamais eues auparavant. Nous avons créé un service spécialisé que nous appelons « mines numériques ». Parce que si nous n’avons pas la bonne méthode maintenant pour établir une seule version de la réalité et prendre des décisions éclairées, alors nous ne pourrons pas utiliser l’intelligence artificielle et les progrès de ce genre dans l’avenir. Nous devrons repartir de zéro pour arriver à cette « pensée numérique » dont nous aurons besoin pour créer de nouvelles activités.
Marino : Pour passer à un autre sujet de l’heure : les facteurs ESG et l’importance de les intégrer dans le processus de décision. En quoi prendre des décisions en fonction des critères ESG facilite le financement dans votre entreprise?
Darren : En fait, nous tenons compte des facteurs ESG depuis de nombreuses années. Et ça commence dès que nous mettons les pieds sur un site, où qu’il se trouve. Car il faut évidemment évaluer et identifier les parties prenantes. Nous faisons cela depuis de nombreuses années. Nous avons travaillé en collaboration avec la BERD et la SFI qui ont, à toutes fins utiles, créé les principes d’équité qui sont intégrés dans le financement de tous les projets à présent. Les banques occidentales, qui sont notamment une source de financement par emprunt, adhèrent de plus en plus à ces principes. Centerra est membre du World Gold Council depuis trois ans et souscrit par conséquent aux principes de l’exploitation minière responsable. Nous pensons atteindre la pleine conformité d’ici septembre de cette année. Ce sont 51 principes qui touchent à tous les critères ESG. La conformité à ces principes nous permettra de faire nos preuves auprès des parties prenantes, investisseurs, actionnaires, obligataires et créanciers. Mais en même temps, il faut s’ajuster en fonction de l’emplacement des mines. Nous sommes en Colombie-Britannique, mais aussi aux États-Unis et en Turquie et les principes ne s’appliquent pas tous de la même façon. Il faut s’adapter. Cela dit, il faut avoir les données; il faut avoir un processus pour s’assurer de les obtenir afin de pouvoir informer les autorités de réglementation et les parties prenantes. Et si cette information est incorrecte, vous risquez un bris de confiance. C’est pourquoi je le répète, il est important de recueillir une information précise pour pouvoir prendre les bonnes décisions.
Marino : Au-delà du processus de transformation en soi, comment vous êtes-vous assuré que tout s’intègre correctement?
Darren : Chacune de nos mines dispose d’un service de collecte de données local. Et ce n’est pas séparé du processus de transformation informatique que nous entreprenons actuellement. À côté de SAP, nous avons trouvé un autre produit qui enregistrera tous nos engagements au titre des permis d’exploitation minière et des permis environnementaux. Par exemple, pour répondre à nos obligations à l’égard des Premières Nations, nous devons réunir un volume considérable de données. Et malheureusement nous avons procédé manuellement pour les données sur le personnel jusqu’ici, comme les autres sociétés minières je présume. Il y a un processus en place, mais il est loin d’être entièrement intégré en un seul endroit qui peut produire des rapports à partir d’une seule source. Le respect des critères ESG n’est pas un exercice séparé. Tout est lié. On peut avoir une très bonne information financière tout en prenant une mauvaise décision sur les critères ESG ou en ayant les mauvaises données, et détruire la réputation de la compagnie et ses relations avec ses parties prenantes. Il est donc essentiel que les décideurs aient toute l’information.
Marino : Merci pour ça. Et j’apprécie la franchise parce que c’est exactement ça. Selon notre expérience, il n’y a rien de plus difficile que de réunir des données qui viennent de plusieurs sites séparés, qui n’ont rien à voir les uns avec les autres. C’est parfois un grand défi dans votre secteur. L’autre défi, qui me tient à cœur en tant que spécialiste de la transformation, est de savoir clairement quel est le retour sur investissement d’un projet de transformation, ce qui est particulièrement important pour obtenir l’adhésion des parties prenantes. Quand vous avez dû convaincre vos parties prenantes, comment avez-vous abordé la question du RSI?
Darren : Alors notre conseil d’administration fixe des seuils pour les projets d’investissement, petits et grands, et nous essayons de les atteindre. Pour les systèmes informatiques, nous pensons que nous pouvons atteindre ces seuils sur le plan financier, grâce évidemment au système SAP, mais nous considérons le tout comme un seul projet. Donc lorsque nous calculons les rendements financiers et collectons les données ESG, c’est une seule et même chose parce nous pouvons avoir des rendements financiers, mais aussi réduire le risque financier. Ce n’est pas seulement le taux de rendement, c’est aussi la gestion du risque. Et mettre ensemble l’information financière et les données ESG et autres permet d’assurer d’avoir les deux, pour aujourd’hui et pour l’avenir. Sur une période plus longue, on peut voir les tendances et prendre des décisions rapidement pour ne pas tomber dans le piège d’une grosse dépense d’investissement ou d’un risque trop grand parce qu’on n’a pas réussi à trouver ce qu’était effectivement la tendance. À la hausse ou à la baisse. Maintenant nous pouvons le faire et fournir l’information à nos parties prenantes. Ça a beaucoup plus de poids qu’un « faites-moi confiance » dans une conversation avec les autorités de réglementation ou les Premières Nations.
Marino : Nous arrivons à la fin de notre balado. Pourriez-vous dire à nos auditeurs les trois principaux apprentissages que vous avez tirés de votre processus de transformation?
Darren : Pour moi – et je pense que je peux parler pour toute l’équipe responsable de ce projet –, c’est reconnaître l’importance des travailleurs de première ligne, de leurs besoins et des données qu’il leur faut pour avoir la bonne information et prendre les bonnes décisions. Chez Centerra, nous avons toujours imposé les systèmes. Et même si ces systèmes sont les meilleurs qui soient, en fin de compte ils ne répondent pas à leurs besoins. Cette fois-ci, nous avons changé de méthode et nous avons obtenu leur adhésion parce que nous les avons consultés. Il ne faut pas non plus sous-estimer le temps nécessaire pour trouver le bon système. Nous avons entrepris une analyse approfondie des données pour savoir lesquelles choisir et quelles décisions elles permettaient de prendre. Nous avons examiné tous les systèmes que la Terre ait porté vous savez, avec l’aide de conseillers pour valider nos choix. Nous avons, là encore, partagé les résultats avec nos employés pour montrer que le système sélectionné répondait aux besoins. Tout cela a pris du temps, mais nous pensons que ce sera un avantage dans l’avenir, ne serait-ce que par l’adhésion du personnel. Une dernière chose importante : il faut savoir que choisir un système informatique n’est pas très excitant. Nous ne sommes pas en train de découvrir un nouveau gisement et nous n’allons pas en tirer un rendement extraordinaire comme pour une mine. Ce sont des coûts administratifs. Il y a toujours un rendement, mais il faut avoir le soutien de la direction, dans toutes les fonctions de l’entreprise. Alors il faut faire participer l’équipe de direction, le directeur général, le président local du site. Ensuite, il faut faire participer les employés et obtenir leur adhésion au projet, parce qu’autrement ils n’utiliseront pas les systèmes et ils les contourneront. Ça s’est déjà vu. Donc je pense vraiment qu’il est essentiel d’avoir l’appui de la direction et du conseil d’administration.
Marino : Excellent. Darren, ça a été un plaisir d’échanger avec vous aujourd’hui. Merci d’avoir accepté l’invitation. Chez PwC Canada, nous sommes axés sur les solutions et nous pensons que les services des finances ont un rôle important à jouer dans le succès de leur entreprise. Si vous voulez faire partie de notre communauté des chefs des finances axés sur les solutions, n’hésitez pas à me contacter. J’espère que vous avez apprécié ce septième épisode de la saison 2. Nous serions ravis de connaître votre avis sur cette série. N’oubliez pas de vous abonner et de partager votre avis en nous laissant une note ou un commentaire. Je m’appelle Marino Fremis et vous écoutez « Finance in 15 ».