Dominique : Bonjour et bienvenue à cet épisode de Femmes en finance, une mini série du balado « Finance in 15 » de PwC Canada. Je m'appelle Dominique Fortier. Je suis directrice principale des services à nos clients chez PwC Canada. Très heureuse d'être votre hôte aujourd'hui. Nous lançons cette série spéciale pour élargir les discussions sur la façon de bâtir la fonction Finances de l’avenir. Nous entendrons aujourd’hui les points de vue des dirigeants qui naviguent dans le monde des finances en constante évolution. Pour cet épisode en français, je suis ravie d’accueillir Maarika Paul, première vice-présidente et cheffe des opérations et de la Direction financière de la Caisse de dépôt et placement du Québec, et Lisa To, cheffe de gestion financière et performance du Groupe Finance de la Banque de développement du Canada, la BDC. Bienvenue à vous deux, Maarika et Lisa.
Maarika : Bonjour, merci.
Dominique : Avant de nous lancer dans le vif du sujet, puis-je demander à chacune d’entre vous de nous parler brièvement de votre rôle au sein de votre organisation?
Maarika : Alors si je commence, Dominique, c’est Maarika. J’ai passé plus de dix ans à la CDPQ au début comme CFO, responsable des différentes activités comme la trésorerie, fiscalité, divulgation, budget, analyse de rendement et évaluation et également audit interne. Et par la suite, on a fait évoluer l’organisation pour inclure également les opérations et le « back office » comme on dit, qui font maintenant partie de toute notre chaîne de divulgation. Et j’assiste également mes collègues en talents et performances, technologies numériques et affaires publiques. Et je préside notre COE, un comité justement qui regroupe tous les services généraux. Alors, ça fait un sommaire de ce que je fais à la Caisse.
Lisa : De mon côté, ben je dirige le Groupe de gestion financière et de la performance au sein de BDC. Fait que, sous mon groupe, on a quatre grandes sections. On a l’équipe de planification financière et partenaire d’affaires, la trésorerie et la gestion de la caisse de retraite, la gestion des performances et analytiques d’affaires, et finalement l’approvisionnement et la relation des fournisseurs. Au-delà de ces fonctions plus opérationnelles, je suis également, je m’appelle marraine ou sponsor exécutif de plusieurs programmes stratégiques et transformationnels de BDC.
Dominique : Très intéressant. Puis, Lisa, Maarika, on voit que vos parcours professionnels sont bien différents, mais vous ont toutes les deux menées vers des rôles d'exécutives. Et on peut dire que le rôle de leader en finance a beaucoup évolué au fil des années. Je commence par toi, Maarika. De par ta grande expérience, comment pourrais-tu décrire justement les acquis nécessaires pour être un bon leader en finance en 2022?
Maarika : Ben, je vais vous donner un petit résumé de mon passé. Au début, j’ai passé dix ans chez KPMG, en audit et en finance corporative. Ensuite, j’ai passé seize ans chez BCE dans divers rôles. Au début, dans l’analyse de performance, budgets, fusions, acquisitions, c’étaient vraiment des rôles qui traitaient des questions techniques dans divers secteurs, c’était important. Ensuite, j’ai pris en charge les relations avec les investisseurs et par la suite les communications financières. Ensuite, on m’a demandé de jouer le rôle du chef du cabinet pour le PDG. Et là, j’ai appris comment comprendre la gouvernance. La politique de l’organisation. Je suis devenue PvP Service corporatif, puis ça, ça incluait des secteurs comme l’immobilier, puis la flotte de Bell à l’époque. Et tout ça, c’était la gestion de grandes équipes dans divers services où je n’étais pas experte. Je pense quand vous avez l’opportunité justement de jouer différents rôles qui ne sont pas nécessairement tous reliés, il y a beaucoup de rôles là-dedans que tu dirais, wow, pourquoi un CFO aurait fait ça? Ça nous permet justement, t’sais de le faire. C’est comme faire des petits dessins à numéros, puis t’es pas sûre à la fin que tu connectes tous les points. Et puis ça, ça donne un CFO à la fin. Quand on est en plein dedans, on ne le voit pas nécessairement. Alors c'est ça, je pense, que ça prend.
Dominique : J'aime beaucoup ton analogie avec les dessins à numéros. On voit qu'il y a beaucoup de couleurs là-dessus, tu perçois beaucoup de couleurs pour les futurs gestionnaires en finance. Toi, Lisa, de ton côté, qu’est ce qui t’a attirée vers un rôle de gestionnaire en finance?
Lisa : En fait, c'est exactement ce que Maarika vient de dire. L’évolution. Sincèrement, il y a 25 ans, 30 ans après les études, de mon côté, malgré que j’ai une spécialité en comptabilité finance, j’ai choisi finance. Fait que par la suite, j’ai fait de la consultation SAP technologie, commerce international, beaucoup de gestion du risque dans les marchés financiers, la conformité et gestion des processus. Ça m'a amenée à voir que finalement, il y a un endroit où je vois, « the cash is flowing. » Où on voit le système sanguin d’une organisation. Et c’est la fonction Finances. Et là, en même temps, je n’étais pas la seule à le voir. Maarika vient de le dire. Le métier a évolué, le groupe a évolué, les fonctions Finances avaient évolué. On commence à prendre plus un rôle de conseil et plus, à essayer d’expliquer comment créer de la valeur, identifier les opportunités qui sont peut-être cachées, mais surtout normaliser. Tout le monde va faire les choses à sa manière dans une organisation, puis arriver à la même fin. Mais nous, finance, on est capable de l'expliquer, puis sortir le vrai message à travers les chiffres. Ça pour moi, c'est quelque chose qui me fascine, puis ça me fascine encore.
Dominique : Excellent. Ça me mène tout à fait dans le cœur de la prochaine question qui est, on constate que la fonction Finances se transforme depuis plusieurs années avec les nouvelles technologies, avec l’analytique de données. Puis là, comment on fait pour faire évoluer l’équipe finance, pour continuer la transformation et s’assurer qu’elle est au premier plan des stratégies d’affaires puis qu’elle soit indispensable pour les hauts dirigeants de la prise de décision. Lisa, tu l'as déjà abordé un peu, peut-être que tu peux poursuivre sur cette lancée.
Lisa : Oui, je te dirais une des premières choses que moi, personnellement, je passe beaucoup de temps. Puis on a le privilège parce qu'on a.
Maarika : Vu.
Lisa : Que faire un lien de ce que on voit avec les opérations, avec les unités d'affaires. Et après ça, pouvoir traduire ça. Moi, j'ai une formation de CMA, CFA. Ça me permet de traduire par des décisions, des questions. Parce qu’une bonne décision c’est bien, mais éviter une mauvaise décision, c’est aussi important, on devient vraiment un « trusted advisor » ou un conseiller expert au sein alentour du PDG. Puis c’est ça, je pense que ça va, ça va nous rendre indispensables parmi beaucoup d'autres choses aussi.
Dominique : Maarika, de ton côté, comment tu vois les gros piliers pour transformer et continuer de faire évoluer les équipes finance?
Maarika : Ben justement, il faut être un partenaire stratégique. Et comme Lisa dit pour l’être, il faut bien comprendre, alors faire des liens comme elle dit. Mais l’autre avantage qu’on a, c’est qu’on a aussi un point de vue indépendant. Il y a justement des équipes d'investissement, etc. Tout le monde a sa nuance, comment il veut présenter des résultats. Puis on dit tout le temps on peut faire dire n’importe quoi aux chiffres, alors ça te prend une fonction comme Finances justement de, d’être le groupe fiable, indépendant, qui va donner le vrai portrait de quelque chose, ça c’est super important. Surtout par exemple dans des équipes d’évaluation, etc. Aussi ce qui est très important dans la fonction Finances de plus en plus, c’est la capacité de simplifier des choses, de enlever toutes les goulots d'étranglement, de changer les process, les communications, les activités. Un de mes anciens patrons disait toujours qu’il y a deux types de, de personne dans le monde, ceux qui sont des simplificateurs et des complexificateurs et tu ne voulais pas te trouver dans ce deuxième groupe alors je pense, ça c'est super important.
Dominique : Merci beaucoup. Et si on se tourne un petit peu vers la gestion des ressources, un des nombreux défis, des chefs des finances, c'est certainement la pénurie de talents que toutes les organisations vivent, grandes ou petites, de nos jours. Puis j’aimerais savoir quels sont les moyens que vous prenez pour y faire face.
Maarika : Alors si je commence, il faut que nos gens sentent qu’ils font une différence. Ils savent comment ce que eux font contribuent dans toute la chaîne d'une organisation. Et de reconnaître le travail, peu importe qu’on soit quelqu’un dans les comptes payables, qu’on calcule des rendements, qu’on fasse des émissions de dette, chacun de ces activités-là a une importance pour l’organisation. Il faut qu’on sache comment on « fitte » là-dedans, qu’on soit reconnu pour ça. Je pense que c’est ça qui est important. Nous, on fait beaucoup de travail maintenant sur ce qu’on appelle les métiers du futur où on regarde justement en finance, qu’est ce qui est nécessaire? Des capacités de TN? Est-ce que je sais comment utiliser toutes les nouveaux logiciels, les outils qui sont disponibles? Est-ce qu’on sait comment analyser, justement prédire et ensuite influencer? Parce que quand on sent qu’on influence, on sent qu’on joue un rôle important. Alors ça, c’est mon aspect de qu’est-ce qui va nous aider à retenir nos talents.
Lisa : Et pour ajouter, aller chercher et retenir les talents, c’est un, c’est un travail de tous les jours. Chez nous, à la BDC, on a un, je pense qu’on a un avantage, Dominique, parce qu’on est une société des temps. On fait CDQ également. Souvent, nos gens, les profils qu’on recrute, c’est des gens qui justement s’alignent avec notre mission. Ça, c’est quelque chose qui est unique. Qu’on profite beaucoup à être là dedans. Ensuite on est une organisation qui est « Bcorp ». Ça veut dire qu’on respecte les exigences qui sont spécifiques au niveau des normes de matières, en matière d’environnement, au niveau de performance sociale et gouvernance. Et finalement, je rejoins Maarika. Une des choses que je remarque également et qui peut retenir mieux nos employés, nos talents, c’est de leur montrer le parcours de carrière. C’est récent qu’il y a moins de, moins d’intérêt à rester en finance pour 30 ans, ce qui est quelque chose qu’on avait peut-être plus souvent dans le passé. Mais aujourd’hui, nos professionnels aimeraient ça voir d’autres choses grandir à l’extérieur de finance ou même à l’intérieur, bâtir un groupe de finance. Et c’est bon ça, parce qu’on vient de le dire, pour être un bon finance, une personne de finance et il faut faire des liens, faut comprendre. C’est qu’on encourage beaucoup ça et c’est facile de le dire, il faut le mettre en place, il faut le planifier parce qu’on a quand même des capacités, un travail à faire.
Dominique : Excellent. Vous avez déjà touché un peu à la prochaine question. Je m’en allais vous demander de se projeter dans le futur, puis de regarder ce à quoi les leaders dans la finance doivent penser pour le futur. Vous avez touché aux valeurs et puis aux métiers du futur et j’ai, il y a-tu d'autres grandes tendances que vous voyez qui devraient être, je vais utiliser « top of mind » ou qui devraient être une priorité pour les, pour les équipes du futur? Maarika, commençons par toi.
Maarika : Mais on a deux types de leaders. On a des gens qui sont experts, des leaders experts en finance ou en investissement ou en risque. Puis on a des gens qui sont des gestionnaires et ces deux choses-là ne vont pas toujours ensemble. Et on pensait toujours pour devenir un leader, fallait que tu sois un gestionnaire, que tu gères des équipes, etc. Mais on a créé des « career path » pour les deux. Il y a des gens qui veulent toujours être experts techniques dans quelque chose, puis on a besoin de ces gens-là. Ils veulent pas gérer du monde. Bien d’autres gens qui veulent, aspirent en effet de gérer une équipe. Mais je pense, il faut justement avoir des chemins pour chacun de ces personnes-là. Il faut qu’ils soient capables d’être des influenceurs, des gens qui analysent et, beaucoup des bons communicateurs. Et comme j’ai dit déjà avant des simplificateurs, pour moi, c’est ça que ça prend comme leader futur.
Dominique : Et de ton côté, Lisa, il y a-tu quelque chose qui te vient en tête?
Lisa : Oui, je rejoins la même liste que Maarika, puis là, on va être exigeants. Je vais ajouter deux choses en plus. Je pense que tout changement, ça va être quelque chose qui reste, fait que je dirais un agent de changement aguerri et peut-être du côté technologie, ça touche ça mais moi je vais spécifiquement nommer l'analyste, l'analytique des données.
Dominique : C'est rassurant de voir que deux leaders s’entendent sur les choses importantes pour le futur. Et puis, on arrive déjà vers la fin de notre épisode, alors j’avais envie de vous poser quelques questions en rafale pour apprendre à mieux vous connaître, sous d'autres angles. Donc je me lance, si vous aviez une chance de rencontrer une leader, du monde des affaires ou de tout autre milieu, qui serait-elle et pourquoi?
Lisa : Je vais définitivement vouloir rencontrer Mère Teresa. C’est une femme avec conviction, résilience et j’aime ça quand elle persévére pour accomplir sa mission.
Maarika : Moi je rencontrerais Barack Obama, quelqu'un d’intelligent, intéressant, un excellent communicateur.
Dominique : Magnifique. Une chose pour laquelle vous aimeriez dire merci, dont vous êtes reconnaissantes.
Maarika : Moi, j'ai deux choses : ma santé, je ne sais pas à qui dire merci, mais ma santé et à mes patrons qui m’ont donné des chances justement de me prouver.
Lisa : De mon côté, je vais dire merci à tous les gens que j'ai côtoyés, directement, indirectement de toutes mes années vivantes, surtout ceux et celles qui m’ont aidée dans ce qui est professionnel, non professionnel. Et surtout ceux qui m’ont mis au défi qui a rendu ma vie difficile parce que c'est là où j'ai réussi à apprendre.
Dominique : C'est courageux. Une qualité que vous remarquez chez les plus jeunes.
Maarika : La curiosité, puis la capacité d’adopter des nouvelles technologies.
Lisa : Dans la même veine. La conviction.
Dominique : Qu’est-ce que vous vouliez faire quand vous étiez petites?
Lisa : Moi je voulais. Vous allez rire. Moi, tout ce que je voulais faire, c’était une caissière. And that's it. Mais la vie m'a amenée ailleurs.
Maarika : Moi, je voulais devenir diplomate aux Nations Unies.
Dominique : Rien de moins.
Maarika : J’aimais les langues, je ne savais pas ce qu’une diplomate faisait, mais j’aimais les langues. Et je me suis dit, mais il faudrait que tu parles plusieurs langues aux Nations Unies. Alors ça serait « cool ».
Dominique : Super, merci beaucoup. Deux petites dernières questions, qu’est-ce qui vous amuse ou même vous fait rire par rapport au chef des finances? Celle-là n’est pas facile.
Lisa : Moi, je trouve ça facile parce que j’ai un CFO, fait que je vais lui dire, même devant lui là. Qu’on pense que les gens de finance sont souvent sérieux, puis même un peu plates. Ce n’est pas du tout ça. En finance, on peut avoir énormément de plaisir.
Maarika : Et je dirais, moi ce qui me fait rire, c’est qu'à chaque printemps, tout le monde qui connaît pas tellement les finances me demande toujours, « Ah, tu dois être en train de faire des rapports d'impôt. »
Dominique : Ça c’est trop vrai. Et pour terminer dans nos questions en rafale, j’aimerais que vous nommiez une chose que vous souhaitez personnellement léguer à la prochaine génération de leaders en finance.
Lisa : J’avais surtout suggéré à nos jeunes leaders de toujours rester curieux parce que la fonction Finances est une fonction qui est bien placée pour poser des questions. C'est transversal, on voit le « flow » assez clairement à travers nos outils et nos connaissances des opérations, mais aussi du côté financier, c’est vraiment une position privilégiée dans une organisation. N'hésitez pas de poser des questions, faire les liens, mais bien parce que je crois profondément, plus qu’on comprend ce qui se fait réellement dans le terrain, avec nos connaissances financiers, plus on va être performant en fonction Finances et on va amener l'organisation ailleurs.
Maarika : Ce que j’aimerais léguer à la prochaine génération, c’est que toutes les tâches et les processus plus manuels, plus plates qu'on doit faire, qui existent encore, qu’on règle tous ces problèmes-là, on les automatise pour que les équipes puissent justement se concentrer sur tout ce qui est prévu, prédictives ou ils apportent une valeur ajoutée. On a parlé justement d'analyse de données très utilisables, très, qui nous apportent de la valeur. Tout ça, puis laisser toutes les affaires plates de côté. C’est ça que je veux pour le futur.
Dominique : Fantastique, Maarika et Lisa. Ce fut vraiment, vraiment agréable de discuter avec vous aujourd,hui. Merci d’avoir été des nôtres. À vous tous qui nous écoutez, surveillez les prochains épisodes de Femmes en finance qui seront disponibles cet automne. Si vous voulez écouter notre premier épisode, consultez notre site Web, L'avenir de la fonction Finances où vous trouverez notre discussion avec Vanessa Canoux, chef de la direction financière de Telus International. J'espère que vous avez apprécié cet épisode de notre série spéciale Femmes en finance. Et bien sûr, nous serions ravis de connaître votre avis sur cette série. Donc merci de vous abonner, de partager et de nous laisser une évaluation ou un commentaire. Je m'appelle Dominique Fortier. Merci d’avoir été à l’écoute de cet épisode spécial de « Financing in 15 ». Ce balado a été préparé par PricewaterhouseCoopers, société à responsabilité de l'Ontario, pour donner de l’information générale sur des sujets d’intérêt, mais, bien entendu, ne peut remplacer les conseils professionnels.