Série de PwC Canada sur le cannabis

Chapitre 5 – Fusions et acquisitions : Les rendements élevés font bondir les transactions

En attente de la légalisation, chaque semaine, une nouvelle transaction transformationnelle était annoncée dans le secteur du cannabis. À chaque nouveau communiqué de presse, le prix d’achat indiqué était plus élevé que le précédent. En effet, les entreprises payaient des primes de plus en plus importantes pour des prospects dont la valeur restait encore à prouver sur le marché du cannabis récréatif. Malheureusement, dans cette fièvre des transactions, on perd souvent de vue les motifs de base qui sous-tendent les transactions et on oublie de mettre en place un plan concret pour maximiser la valeur de la transaction à long terme pour les actionnaires.

Au chapitre 1, nous avons discuté de la façon dont l’évolution des attentes des actionnaires à l’égard de la légalisation du cannabis récréatif allait façonner le secteur. Comme les transactions transformationnelles devraient continuer pendant l’essor du marché du cannabis, les entreprises doivent maintenant démontrer aux actionnaires que leur capital a été sagement utilisé en vue d’acquérir un avantage concurrentiel.

Pourquoi est-ce important?

Étant donnée la fragmentation actuelle dans le secteur du cannabis, il n’est pas surprenant de voir la frénésie des achats s’emparer des entreprises dont les coffres débordent et qui ont accès à des capitaux à bon marché (en raison des fortes valorisations). Ces entreprises cherchent à faire des économies d’échelle, à élargir leur clientèle de patients, à offrir des produits et services centrés sur le consommateur, à entrer sur de nouveaux marchés ou à acquérir des canaux de distribution protégés.

Ces entreprises cherchent à faire des économies d’échelle, à élargir leur clientèle de patients, à offrir des produits et services centrés sur le consommateur, à entrer sur de nouveaux marchés ou à acquérir des canaux de distribution protégés.

À mesure que se rapprochait la légalisation, la taille des transactions augmentait. On n’a qu’à regarder les acquisitions des têtes d’affiche des producteurs autorisés au cours des trois dernières années pour constater la hausse des valorisations. Comme c’était le cas pour les transactions mentionnées plus haut, les producteurs autorisés ont principalement mis à profit leur forte valorisation sur le marché pour effectuer leurs acquisitions au moyen d’actions. Et bien que les transactions transformationnelles soient à la hausse dans l’ensemble des secteurs, chacune de celles qui sont effectuées sur le marché du cannabis est considérée comme transformationnelle pour l’acheteur et pour le secteur.

Peu importe ses objectifs, la portée et la taille d’une transaction transformationnelle rendent difficile la réalisation du projet initial. Les entreprises du secteur du cannabis doivent s’assurer qu’elles soutiennent leur stratégie générale (comme il a été mentionné au chapitre 2), complètent et renforcent les systèmes de capacités (voir le chapitre 3) et, en fin de compte, créent de la valeur pour les actionnaires.

Plus de la moitié des dirigeants qui figurent au classement Fortune 1000 ont décrit la plus importante transaction qu’ils ont conclue au cours des trois dernières années comme transformationnelle, comparativement à 44 % en 2013 et 29 % en 2010 (1).

(1) Source : Rapport d’enquête de PwC sur l’intégration après les fusions et acquisitions (en anglais seulement)
https://www.pwc.com/us/en/deals/ma-integration-survey/pwc-m-and-a-integration-survey.pdf

Les risques peuvent être élevés

Bien que les fusions et acquisitions soient une mesure importante dans l’exécution de la stratégie d’une entreprise, il reste qu’elles ne sont que cela : un moyen d’arriver à une fin. Elles permettent à l’entreprise de gagner rapidement du terrain sur de nouveaux marchés ou de dépasser la concurrence dans la rentabilité ou la productivité. Toutefois, les dirigeants doivent reconnaître qu’en l’absence d’une stratégie plus large qui intègre le prospect, les transactions peuvent détruire la valeur pour les actionnaires en dilapidant le capital, en distrayant la direction et en échouant à retenir les talents et les relations clés.

Les problèmes courants pour les entreprises à la suite d’une transaction incluent :

  • Incapacité à créer des synergies de revenus.
  • Capacité partielle à créer des synergies de coûts.
  • Plan d’intégration inefficient ou incomplet.

Chacun de ces problèmes peut faire perdre de la valeur aux actionnaires. Il est donc important de bien comprendre les facteurs qui y contribuent.

La stratégie d’intégration d’abord

À la base, on s’attend à ce que le chiffre d’affaires brut de l’entité créée par une transaction (fusion ou acquisition) soit plus élevé que celui généré par les entités de façon indépendante.

Concrètement, les dirigeants doivent s’assurer que la transaction réunit des portefeuilles de produits et des systèmes de capacités qui ne se cannibaliseront pas. Dans le cas contraire, les entreprises risquent de perdre des parts de marchés aux mains de leurs concurrents, et surtout, d’ébranler leur marque et la confiance du public en leur entreprise. Pour les entreprises du secteur du cannabis, sur un marché fraîchement légalisé, cela pourrait être dévastateur.

Sans une stratégie cohérente, les synergies de croissance attendues pourraient ne jamais se réaliser.

Ensuite, se concentrer sur les inducteurs de valeur prioritaires

En plus de chercher à faire croître les revenus, les projets d’investissements au moyen de fusions et acquisitions visent la création d’importantes synergies de coûts dans l’entité créée, particulièrement dans les fonctions administratives (p. ex. approvisionnement, finances, ressources humaines, technologies de l’information) et les actifs. Les biens durables, comme les propriétés, les usines et l’équipement, peuvent être rationalisés, soit en les combinant ou en les fermant. Pour leur part, les synergies des actifs accessoires peuvent être créées grâce à une meilleure gestion du fonds de roulement et des coûts du capital de même que l’optimisation du ratio dette/capitaux propres.

Pour réaliser ces synergies et établir un modèle opérationnel durable pour l’entité créée, l’acheteur doit s’appuyer sur les résultats du contrôle diligent pour valider de façon continue les possibilités de synergies et comprendre les risques potentiels pour l’entité créée. Après, il doit déployer un processus structuré et attitrer une équipe à cette fin. Dans un environnement composé d’actifs autorisés disparates partout au Canada, la création d’un plan visant à stimuler les synergies sans éliminer la valeur du prospect revêt une importance capitale.

Gérer l’intégration comme un processus commercial

Malgré l’importance de l’intégration, les entreprises oublient souvent la valeur d’un plan d’intégration efficace. À mesure que la taille et la complexité de ces transactions augmentent, il devient de plus en plus important d’avoir un plan détaillé. Comme les entreprises du secteur du cannabis cherchent toujours plus à conclure des transactions transformationnelles, les dirigeants doivent reconnaître la complexité de l’intégration d’organisations et d’actifs interfonctionnels dans un environnement réglementaire en pleine évolution. Sans compter que l’internationalisation de secteur du cannabis amène un plus grand nombre de transactions transfrontalières.

Les dirigeants doivent aborder les questions de ressources humaines entourant les transactions transformationnelles (p. ex. incertitude des employés à la suite de la transaction), qui surviennent en raison d’un manque d’harmonie entre les parties prenantes et de l’absence d’un plan de transition de la main-d’œuvre approprié. Les employés sont les actifs les plus précieux d’une organisation. C’est sans doute encore plus vrai dans le secteur du cannabis, où on est encore à bâtir un cadre technologique visant à institutionnaliser les connaissances. Dans ce contexte, les clés de la réussite sont entre les mains des employés.

Les entreprises doivent résoudre ces problèmes liés à l’exploitation et aux ressources humaines afin de soutenir la durabilité de l’entreprise, sans quoi le modèle opérationnel du prospect pourrait n’être ni agile ni capable de réagir aux changements du secteur, ce qui pourrait mettre l’organisation à risque.

Des erreurs qui coûtent cher

Il est rare qu’une intégration se fasse sans heurts. En effet, on rencontre souvent quelques écueils en cours de route. Le rôle des dirigeants est de réduire les risques au minimum et de hausser la valeur globale pour les actionnaires. Sans plan, les risques de détérioration des marges, de disruption au sein de l’entreprise et, potentiellement, de faillite augmentent de façon importante. À part les répercussions évidentes pour le prospect et l’acheteur, dans le marché du cannabis en rapide évolution, ces erreurs permettent également aux concurrents de gagner des parts de marché et de consolider leur position auprès des patients, des consommateurs, des sociétés des alcools et des partenaires potentiels.

Il existe une solution

La solution? Les entreprises doivent établir un programme personnalisé de fusions et acquisitions, et s’en servir comme ressource pour guider ces activités dans le cadre de la stratégie d’entreprise, tout en atténuant la disruption dans ses activités principales. Un programme de fusion et acquisition offre un point de référence commun quant à la structure, à la planification, à la coopération et à la discipline tout au long du cycle de vie de la transaction. Ce programme devrait s’accorder avec la stratégie et les objectifs de l’entreprise, son goût pour le risque, sa structure opérationnelle, sa culture, son système de capacités et son réseau d’intervenants.

Les programmes de fusion et acquisition couvrent l’ensemble des étapes de la transaction, de la stratégie prétransactionnelle à la mise en œuvre posttransactionnelle en passant par l’intégration, comme le montre notre approche décrite plus bas.

Les programmes de fusion et acquisition couvrent l’ensemble des étapes de la transaction, de la stratégie prétransactionnelle à la mise en œuvre posttransactionnelle en passant par l’intégration, comme le montre notre approche décrite plus bas.

Stratégie transactionnelle

Toute transaction commence par une stratégie. Il est crucial que cette dernière s’aligne avec l’ensemble des autres stratégies de l’entreprise (globale, de croissance et de fusion et acquisition) pour en renforcer l’orientation globale, ce qui lui permet de mieux choisir et approcher les cibles de fusion et acquisition dans une optique de croissance.

Processus de contrôle diligent intégré

Ensuite, une approche intégrée du contrôle diligent offrira un éclairage cohérent des risques potentiels ainsi que des défis et des opportunités pour l’acheteur, et ce, avant la clôture de la transaction. Les résultats des services de contrôle diligent commercial, financier, opérationnel, informatique (notamment de la cybersécurité) et des ressources humaines doivent faire l’objet de discussion avec l’ensemble des intervenants pour permettre aux deux parties d’élaborer des analyses de rentabilité et maximiser la valeur de la transaction à sa clôture.

Modèle d’exploitation pour le prospect et plan d’intégration

Pour concevoir un modèle d’exploitation efficace pour le prospect, ce dernier et l’acheteur doivent tout d’abord examiner l’ensemble des éléments de leurs stratégies individuelles et identifier les principales opportunités de consolidation et de synergies. Il est crucial qu’ils adoptent tous les deux une attitude ouverte dans ce processus pour vraiment comprendre comment les entreprises se distinguent et se complètent.

À la fin de la conception du modèle d’exploitation, un plan d’intégration du travail doit également être élaboré pour chaque champ d’activités en vue du jour 1. Les retards ne créent aucune valeur. L’accélération du plan de transition permet d’obtenir des résultats rapidement et d’augmenter la création de valeur pour les actionnaires.

Gestion de l’intégration

Plus la transaction est complexe, plus les interactions entre les dirigeants et les équipes de direction sont importantes pour profiter des avantages. Un alignement rapide de la structure de gouvernance, notamment des rôles et responsabilités dans chacun des champs d’activités et à tous les niveaux de l’organisation permettra aux ressources de se mobiliser en vue de la réussite de l’intégration.

La gestion des intégrations doit être vue comme faisant partie des processus d’affaires de l’organisation. En utilisant les meilleurs outils, modèles et conseillers, les équipes fonctionnelles peuvent suivre la progression de l’intégration, l’expliquer aux dirigeants et rapidement rectifier le tir, au besoin.

Communication et gestion du changement

Finalement, on n’insistera jamais assez sur l’aspect culturel des intégrations. Toute intégration doit être élaborée en fonction de la culture d’entreprise et incorporée dans un plan de communication et de gestion du changement. Offrir une communication complète tôt dans le processus peut aider à améliorer la rétention des clients, l’engagement des employés et la productivité. Cela peut donner confiance dans le processus global et faciliter la prise de décision. Agissant à titre de stabilisateurs pour contrer l’incertitude, les plans de communication et de gestion du changement aident à atténuer les risques en répondant de manière proactive aux questions et aux inquiétudes de l’ensemble des parties prenantes.

Le jeu en vaut la chandelle

La planification de l’intégration d’un prospect est cruciale à la création de valeur pour les actionnaires. Même si la tâche semble laborieuse, si les bonnes personnes s’y prennent de manière méthodique au moyen de systèmes appropriés, elle n’est pas impossible. En fin de compte, les avantages d’une intégration réussie peuvent dépasser largement les coûts et les risques de la transaction.

Comme le secteur évolue rapidement, on s’attend à des difficultés à mesure que les forces du marché séparent les gagnants des perdants. Dans le chapitre 6 de notre série sur le cannabis, nous nous penchons sur la restructuration du secteur du cannabis.

La présente publication est produite par PricewaterhouseCoopers LLP/s.r.l./s.e.n.c.r.l. (PwC) à des fins éducatives et de compréhension générale du paysage du cannabis, et non pas pour fournir des conseils d’un professionnel en financement, investissement ou autre. Ces publications n’ont pas pour objet de remplacer les conseils d’un professionnel en financement, investissement ou autre. En utilisant cette publication, vous comprenez et acceptez qu’il n’existe aucune relation entre vous et PwC ni aucun de ses cabinets membres. Cette publication n’a pas pour objet de remplacer les conseils d’un professionnel en financement, investissement ou autre.

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